Moté

La vie, c’est comme les mirabelles

Writober 2021 #01 – L’autre côté du rêve


Certains font l’inktober. Pour ceux qui préfèrent écrire, on appelle ça le writober. Je n’utilise pas la liste de base, mais une spéciale pour le writober.

https://textes.spacefox.fr/inktober2021seuils/nanochimeres.jpg
Liste des thèmes

Sans plus attendre, ma nouvelle pour le premier thème.


— Et Arménos, vous vous occupez de Matéo. Bien, chacun a son affectation, alors au travail messieurs.

L’étrange créature humanoïde qui venait de s’exprimer rangeait divers papiers dans des dossiers posés devant elle, sur la grande table ovale. Autour de cette dernière, une douzaine d’êtres semblables se levaient et se dirigeaient vers la sortie de la salle de conférence aux murs vitrés.

— Et n’oubliez pas : que cette nuit soit mémorable.

Arménos chemina avec les autres vers une vaste pièce. Les murs étaient recouverts d’étagères débordant de tout petit matériel, et de supports ployant sous le poids de milliers et de milliers de marionnettes. D’autres portes s’écoulait un flot ininterrompu des collègues d’Arménos. Les groupes se séparaient en entrant, et chacun, comme lui, se dirigeait vers une petite table, sans siège, qui lui était attribuée. Séparées des autres par un simple écart d’un mètre, elles emplissaient toute la surface de la pièce.

Arménos arriva à son bureau. Dessus, comme sur tous les autres, trônait un simple cadre en bois, posé à plat, rectangulaire et de la hauteur d’une main. Il posa à côté le dossier qu’on lui avait fourni, sur lequel était écrit en lettres capitales MATÉO, l’ouvrit, et pris quelques minutes pour l’examiner consciencieusement. Il hocha la tête quelques fois avant de la redresser et de s’éloigner.

L’humanoïde s’approcha rapidement du mur le plus proche. Au milieu de ses collègues tout autant affairés que lui, il s’empara d’un carton et commença à le remplir de matériel. Il se dirigea ensuite vers le rayonnage de marionnettes le plus proche et se saisit de trois d’entre elles. Il retourna ensuite à son poste de travail.

Là, il posa sa boite, et en sortit divers éléments qu’il installait dans son cadre en bois. Un décor émergea des gestes précis d’Arménos : là un camion miniature, là un lampadaire minuscule, un morceau de route, et un petit jardin. Une fois satisfait, il se frotta les mains sur ses vêtements, attrapa ses marionnettes, et attendit, le regard fixé sur son décor.

XXX

« Et vous avez vu, dans les rêves, on peut pas regarder le ciel. En fait, on peut pas du tout regarder en haut, on fait que regarder autour sans regarder en haut. »

Matéo était songeur. C’était ce qu’avait dit son copain Tristan à la récré, et ils avaient tous réagi en disant que tiens, c’était vrai, ils n’y avaient jamais pensé, mais ils n’avaient jamais regardé en haut en rêve. Cela intéressait bizarrement Matéo, sans trop qu’il sache pourquoi, maintenant qu’il était sous la couette et s’apprêtait à s’endormir.

XXX

Matéo était en train de se faire servir au camion de glace, en rougissant. Il était toujours très timide face aux jolies dames, même si elles étaient adultes et pas lui. La serveuse lui tendit sa glace vanille-fraise en souriant, et il bredouilla un remerciement. Il s’éloigna, goutant sa glace, et laissant le suivant dans la file d’attente prendre sa place.

Il trouvait que c’était une chouette journée.

Soudain, quelque chose le frappa à l’esprit. Il ne se souvenait pas avoir payé sa glace, et la dame ne lui avait rien demandé. D’ailleurs, il ne réussissait pas à se rappeler de comment il était venu ici. Et comment se faisait-il qu’il soit en train de manger une glace, en t-shirt, pendant une chaude journée ensoleillée ? N’était-on pas en novembre ?

Se remémorant alors ce que lui avait dit son copain Tristan, il leva les yeux.

Le ciel était noir. Mais surtout, il s’y trouvait une tête de cauchemar, gigantesque, emplissant tout son champ de vision. La peau était violette, deux défenses perçaient la bouche grimaçante, et surtout, deux yeux, horribles, rouges, le fixaient sans ciller. Et, penchées sur Matéo, deux mains, énormes, immenses, agitant des fils de marionnettes.


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